Anne-Marie a rencontré...

 

Yves LENOBLE

 

AMT : Monsieur Lenoble, c’est un grand plaisir de vous rencontrer aujourd’hui. Je vous remercie de m’accorder cette interview, car vous êtes une personnalité dans le monde de l’astrologie. Parmi vos activités, vous êtes connu grâce aux congrès Hermès que vous organisez une fois par an. Comment vous est venue cette idée ?

 

YL : Le 1er congrès a eu lieu en 1990, mais ce n’était pas encore un vrai congrès. Ce congrès était un peu le prolongement de réunions que j’organisais une fois par mois. Car en 1990, le milieu astrologique était pauvre en échanges et en rencontres. C’était même l’inertie. C’est lors d’une soirée où Lynn Bell et d’autres personnes avaient fait venir Robert Hand (Astrologue américain renommé), que m’est venue l’idée d’organiser un week-end astrologique. J’avais entamé une période sabbatique. Depuis un an et demie environ, je n’organisais plus de soirées et j’ai décidé de faire un congrès au mois de mars, dont le sujet serait Mercure.

 

AMT : Pourquoi Mercure ?

 

YL : J’ai décidé de faire venir une quinzaine de conférenciers, parmi les 40 qui m’avaient accompagné pendant 10 ans lors de mes 70 réunions mensuelles. Et j’ai organisé un week-end autour de Mercure en très peu de temps.

J’attendais environ 50 personnes, comme lors de mes réunions, mais j’ai eu la surprise d’accueillir environ 150 personnes.

 

AMT : Ce fût un véritable succès !

 

YL : Je me suis pris au jeu et je suis devenu, sans le vouloir, l’homme des congrès. Le but c’était d’organiser des rencontres, d’ailleurs Mercure, comme tout le monde le sait, est la planète de la communication. Le 1er congrès a eu lieu au FIAP, rue Cabanis. Là, se sont retrouvés des astrologues de différents courants et les informaticiens de l’époque. Mais devant le succès de ce congrès, j’ai du très vite déménager. A ce moment là, j’ai posé ma candidature au palais des Congrès, et à ma grande surprise, ils ont accepté de recevoir des astrologues.

 

AMT : Comment se sont organisés ces congrès ?

 

YL : Dès le départ, j’avais entrepris de faire une synergie entre le congrès et les librairies, les responsables d’associations, les éditeurs de logiciels. Puis Monsieur Santoni, d’Auréas, m’a proposé d’organiser un vrai salon avec une équipe, ce qui me permettait de me consacrer entièrement au congrès… J’ai trouvé l’idée judicieuse.

Encore une fois, c’est le manque de communication et le manque d’échanges, qui m’a poussé dans cette voie. Il y avait un vide dans le milieu parisien et je me suis lancé comme un défi en organisant ces congrès. Car il y avait beaucoup de personnes qui se tiraient dans les pattes à cette époque. Cela existe encore, mais en 1990, ce n’était que des querelles intestines.

 

AMT : Comment avez-vous organisé ces rencontres ?

YL : La règle de ces congrès, était que chacun pouvait parler d’un sujet qui lui tenait à cœur, à condition de ne pas taper sur le voisin. Si cela avait lieu, je ne l’invitais pas l’année suivante. Cette règle est toujours en vigueur à ce jour. Car la première fonction de l’astrologie c’est d’être à l’écoute des autres et de les respecter et jusqu’à présent, cela a fonctionné. Certains regrettent qu’il n’y ait pas plus débats au sein de ces congrès, mais ils n’ont pas connu les années 70. Si certains aiment déterrer la hache de guerre, moi, je préfère être le pompier qui calme le jeu. Ainsi vous savez comment est né le bébé, le congrès.

 

AMT : Comment s’articule un congrès et qui décide du sujet qui va être traité ?

 

YL : Moi-même, comme j’étais parti sur Mercure, en suivant l’ordre des planètes, j’ai choisi Vénus et la vie affective, Mars et la vie professionnelle etc… Je me suis vite rendu compte, qu’en prenant les planètes comme sujet, cela permettait à chaque courant de s’exprimer. Ce n’est pas facile de trouver des sujets où tout le monde peut s’exprimer, car il faut essayer de faire en sorte que tous les courants participent.

En choisissant Mercure, je me suis rendu compte que c’était une bonne approche, donc j’ai décidé de garder l’approche symbolique.

 

AMT : Quelle est votre ambition et quel est le but de ces congrès ?

 

YL : Mon ambition n’est pas de faire des congrès de très haut niveau, avec de la technique, mais de nourrir la symbolique. Car le symbole est un sujet d’étude inépuisable et on n’a jamais fini de l’approfondir. On ne s’adresse pas aux grands spécialistes en faisant de l’interprétation de haut niveau. Au départ, je faisais partie d’un petit groupe qui s’appelait déjà Mercure. Il était composé de plusieurs courants : il y avait 2 astrologues humanistes, Marief Cavaignac et Jean-François Berry, Marielle Garel, Solange de Mailly-Nesle et moi-même. Nous représentions déjà 3 ou 4 courants. Ce petit groupe m’a permis d’organiser le premier congrès. Et petit à petit, j’ai étoffé avec d’autres courants.

 

AMT : Est-ce que vous avez beaucoup de candidatures pour venir parler au congrès ? Je suppose que vous devez être très courtisé…

 

YL : Oui j’ai beaucoup de demandes. Dans les autres congrès, chacun parle du sujet qu’il a choisi. Moi, je procède différemment, c’est à dire que j’impose un sujet. C’est la règle du jeu. L’intérêt de cette formule, c’est de traiter un même sujet sous différentes facettes en faisant parler les meilleurs spécialistes.

 

AMT : Pourquoi avez-vous choisi le mois de mars comme date de rencontre?

 

YL : Je ne me suis pas posé la question. Comme je suis solaire, je le refais à la même période de l’année pour des raisons pratiques. Selon le années, il se tient avant ou après l’équinoxe de printemps, mais toujours la dernière quinzaine de mars.

 

AMT : J’ai entendu dire que vous organisiez un autre congrès, à l’automne.

 

YL : Oui, c’est un congrès qui s’adresse aux praticiens, aux gens qui maîtrisent bien les techniques astrologiques d’interprétation. Par exemple, le prochain sera axé sur les maîtrises, le dernier a traité les aspects, le précédent, les Maisons etc…

 

AMT : Ce congrès est donc plus pointu.

 

YL : Oui, c’est un congrès de pratique astrologique que Solange de Mailly-Nesle et moi-même organisons. Il y a une dizaine d’astrologues autour d’une table de conférence qui peuvent intervenir à tout moment. C’est une formule plus conviviale. Ce congrès me plaît car je peux intervenir et prendre la parole, alors qu’à celui du mois de mars, cela m’est impossible car je ne peux pas être à la fois organisateur et conférencier.

 

AMT : Au départ, ce congrès d’automne était organisé par l’Agapé ?

 

YL : Oui, en quelque sorte, mais aujourd’hui, nous nous ouvrons de plus en plus à d’autres courants. Par exemple au prochain congrès, il y aura des spécialistes d’astrologie traditionnelle comme Denis Labouré et Danielle Jay. L’année dernière, nous avions Marief Cavaignac, astrologue humaniste.

 

AMT : Quelle est votre formation et quelle astrologie pratiquez vous?

 

YL : J’ai une double formation. En même temps que j’étudiais les sciences humaines, la psychologie, la sociologie, l’ethnologie, je développais ma passion pour l’astrologie. Ce qui me permet d’utiliser ma double casquette. Aux astrologues, je leur dis de faire attention car on ne peut pas ignorer les sciences humaines, et aux scientifiques, je leur dis que l’on ne peut pas séparer l’homme du cosmos. Par ailleurs, je m’intéresse beaucoup aux traditions. J’ai une pratique du yoga, je m’intéresse aussi à l’alchimie, l’acupuncture. Donc j’aime considérer l’astrologie comme une discipline traditionnelle, voire « sacrée ».

 

AMT : Comment apportez-vous votre concours à cette recherche de la tradition ?

 

YL : Actuellement, je participe à la traduction de la Tétrabible, car j’estime que nous devons connaître nos textes traditionnels, nos bases qui ne sont pas connues. Par exemple, le texte grec de Ptolémée n’a jamais été traduit en français. Pour moi, il y a urgence. L’astrologie doit d’abord se constituer comme une discipline avec ses richesses. Car nous ne les exploitons pas ou très peu. Bien sûr, il faut adapter les techniques d’antan à aujourd’hui, mais il faut déjà apprendre à les connaître. Il est aberrant qu’aujourd’hui, on connaisse mieux les textes de Freud et de Jung que les origines de l’astrologie. Les anciens avaient une vision globale, aujourd’hui tout le monde aspire à être holistique, global, mais il faut d’abord aller vers ceux qui l’ont été depuis toujours.

 

AMT : Aujourd’hui, est-ce que l’on n’a pas trop tendance à décortiquer les choses ?

 

YL : Oui, c’est vrai, je trouve que l’astrologie risque de s’émietter.

Chacun a tendance à vouloir trouver un plus d’interprétation, à inventer des modes de calcul, est ce qu’il ne faut pas revenir à un mode d’interprétation plus simple ?

Voilà, chacun cherche à se différencier, à rajouter sa petite spécialité. Mais les planètes sont toujours les mêmes. Oui, je préfère travailler avec 10 planètes, 12 signes, 12 Maisons et quelques aspects majeurs. On retrouve l’esprit des anciens et on tient quelque chose de cohérent.

 

AMT : Aujourd’hui, on travaille avec la technique, et avec des ordinateurs, mais est-ce qu’on ne coupe pas le lien avec l’intuition, avec le cosmos ?

 

YL : Oui, à mon avis, c’est fondamental de retrouver le lien avec le cosmos. Pour répondre à votre question, je suis né dans l’astropsychologie. J’ai appris l’astrologie avec André Barbault et Jean-Pierre Nicola. J’ai eu un enseignement direct de deux des plus grands astrologues de l’époque. Environ dix ans plus tard, j’ai découvert par moi-même qu’il existait une astrologie traditionnelle. Donc je ne suis pas un astrologue traditionaliste, mais je m’intéresse à l’histoire de l’astrologie et j’essaie de retrouver à travers chaque période, ce lien avec le cosmos. Ainsi à chaque époque, il faut reformuler l’astrologie en ayant déjà intégré tout l’acquis antérieur.

 

AMT : Sur quoi travaillez-vous actuellement ? Quels sont les sujets qui vous tiennent à cœur ?

 

YL : Depuis une trentaine d’années, je travaille le sujet des cycles. C’est une vision assez moderne et l’approche que l’on en a actuellement, n’a pas de racines chez les anciens. S’il fallait me caractériser, je dirai volontiers que je suis un astrologue « cyclique ». J’essaie de montrer que dans un thème particulier, les cycles fonctionnent très bien. André Barbault a travaillé les cycles au niveau de l’astrologie mondiale alors que Dan Rudhyar en a parlé sous un angle plus philosophique. Cette technique n’est pratiquement pas connue à l’étranger.

Quel est le sujet du prochain congrès Hermès de mars 2001 ?

Deux sujets seront traités : les signes cardinaux et comment entrer dans un thème, par exemple en astrologie médicale ou en astrologie karmique. La manière dont on entre dans un thème, conditionne beaucoup le développement de la consultation.

 

AMT : Yves Lenoble, je vous remercie de m’avoir accordé cette interview, avez vous un message à donner ?

 

YL : Il est difficile de donner un message en cette période de doriphorie. Nous entrons dans une ère nouvelle et nous ne savons pas trop où cela va nous mener mais nous sommes dans une période de mondialisation, d’interactivité et de globalité. Je souhaite que chaque astrologue fasse passer chaque jour, cette globalité de l’astrologie dans sa pratique et dans sa vie personnelle. L’astrologie est le lien entre l’homme et le cosmos. Il faut faire advenir ce lien à chaque instant. Nous avons un énorme travail à faire pour dégager l’astrologie de toutes les scories qui l’encombrent et pour retrouver la pureté du diamant. Il ne faut pas oublier que l’astrologie existe depuis toujours. Faisons la renaître à sa vraie dimension.

 

 

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