"Le pape sermonne les astrologues"

France-Soir jeudi 3 janvier 2002

Exorciste

L'astrologie et la "nuit de la foi" d'un curé de campagne

Je pratiquais l'astrologie depuis une dizaine d'années lorsque, par l'intermédiaire d'une relation commune, je fis la rencontre d'un curé de campagne qui s'intéressait à la science des astres. Il me confia alors que lorsqu'il était au séminaire, dans les années 1930, de très nombreux candidats à la prêtrise étaient comme lui. Je fis alors avec lui l'étude de son Thème natal et, croyez-moi, ce n'était pas un mystique illuminé : plutôt le genre de curé qui trimballait sa caisse à outils dans sa vieille 2CV pour rendre service à ses paroissiens là où il savait que les prières étaient inefficaces.

Quelques années plus tard, il demanda à me revoir. Il traversait une terrible période de doute, de "nuit de la foi" comme disent les chrétiens, et voulait savoir si cette difficile épreuve pouvait être explicable par des échéances astrologiques. C'était effectivement le cas : il traversait une période où ses modèles, principes et valeurs directrices (pour lui, la foi en Dieu) étaient profondément déstabilisées, remises en question. Nous en parlâmes longuement ensemble. A la suite de cet entretien, il comprit qu'il lui était nécessaire de transformer son rapport personnel au divin pour ne pas perdre définitivement la foi, ce qu'il fit avec de grandes difficultés. Finalement, sa foi en ressortit confirmée et approfondie.

Cette anecdote illustre à merveille les rapports que peuvent entretenir astrologie et religion. C'est dire ma consternation lorsque j'ai lu les propos de Jean-Paul II et de ses gorilles théologiens contre l'astrologie, par ailleurs amalgamée à la voyance et à toutes sortes de pratiques magiques, alors qu'elle n'a rien à voir avec tout ça. Comme les scientistes rationalistes, le pape et ses théologiens ignorent tout de ce qu'ils dénoncent. Affirmer que "Recourir à l'astrologie, c'est s'inscrire contre la foi", comme le fait le dominicain Jacques Arnould est une insulte à la mémoire et à la foi de mon ami le bon curé de campagne, aujourd'hui décédé. L'astrologie n'est pas affaire de croyance, mais d'expérimentation empirique. On ne croit pas aux astres comme on croit en Dieu, à moins d'être astrolâtre, et je sais par expérience que les astrolâtres font de mauvais astrologues.

Je trouve par ailleurs que le pape et ses prélats ne manquent pas de culot. L'ancien comme le nouveau Testament sont plein de prophètes. Jésus lui-même était un prophète, c'est-à-dire un prédicateur d'avenir, et un guérisseur aux incroyables pouvoirs magiques, si incroyables qu'ils laissent sceptique l'astrologue mécréant et agnostique que je suis. Je signale par ailleurs que chaque archevêché a son exorciste officiel dont la mission est de désenvoûter les paroissiens assaillis par Satan ou d'autres diablotins, ce qui n'est pas pire que de croire au spiritisme.

L'astrologie n'a pas de leçons de morale ou de réalisme à recevoir de clercs persuadés de la réalité d'une histoire irrationnelle et abracadabrante selon laquelle un être mi-homme mi-dieu serait descendu sur Terre pour être enfanté par une Vierge, sauver l'humanité et ensuite remonter siéger, son corps glorieusement ressuscité, dans les nuages à la droite d'un Dieu barbu. On a certes le droit de croire à cette histoire, comme on a le droit de croire à toutes les histoires qui nous font peur ou plaisir. Mais nul n'a le droit, en s'appuyant sur ce conte de fées, de faire le procès de l'astrologie sérieuse, qui n'a rien à voir avec l'horoscopolâtrie et qui n'est en rien l'ennemie de la raison ni de la foi, n'en déplaise aux anti-astrologues scientistes et cléricaux.

 

Richard Pellard, directeur de la rédaction d'AstroLogos

____________________________

Retrouvez Richard PELLARD dans la revue Astrologos et sur le site d'Ariana