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C dans l’air »… mais ça sent le roussi !

 

J’ai dû me faire violence pour regarder  jusqu’au bout l’émission « C dans l’air » du 31 décembre dernier, consacrée à « l’astrologie et la crise » (en podcast : http://www.rss-one.com/reader-1937-C-dans-lair---France-5). En effet, assister à ce type de spectacle s’apparente plus à une épreuve qu’à un divertissement, tant notre science s’y trouve systématiquement malmenée. Comme de juste, il n’y a pas eu exception à la règle : l’émission était la copie conforme de tant d’autres sur le même sujet, avec pour but manifeste de discréditer l’astrologie et ceux qui la pratiquent.

On réunit pour cela différents personnages aux rôles bien définis (par la production, cela va sans dire) selon un scénario immuable : l’astrologue est jeté en pâture au scientifique de service qui vient doctement rappeler aux téléspectateurs que l’astrologie doit être considérée au mieux comme un divertissement,  au pire comme un danger car ceux qui s’y adonnent prennent le risque d’y perdre la raison.

En cette soirée de Saint Sylvestre étaient donc invitées deux astrologues médiatiques, Christine Haas et Anne Vilano, chacune en charge de l’horoscope sur une grande chaîne radiophonique, un rationaliste à la dent dure, Alain Cirou, rédacteur en chef de la revue Ciel et Espace, et un écrivain, Bernard Baudoin, visiblement là pour jouer le rôle de M. Loyal et que l’on n’a guère entendu. Même si nos consœurs ne s’en sont pas trop mal sorties — elle paraissent  rodées à ce genre d’exercice —, c’est l’astrologie qui s’en sort nettement moins bien : une fois de plus, nous constatons que les médias entretiennent délibérément l’amalgame entre, d’une part, l’astrologie et la voyance, et, d’autre part, l’astrologie et les horoscopes.

 

Comme dans toutes les émissions du genre, on a montré un centre « astro » au chiffre d’affaires astronomique, en réalité un centre d’appels où officient des « voyant(e)s », souvent travailleurs précaires qui passent sans état d’âme de la messagerie rose à l’astro-voyance. Voila sur quoi se fonde l’affirmation selon laquelle l’astrologie en France représente un chiffre d’affaires annuel d’un milliard €, tandis que des dizaines de milliers « d’astrologues » se partageraient le gâteau de la crédulité publique. Bien entendu, la science d’Uranie est totalement absente de ce business auquel les astrologues authentiques ne sont de toute façon pas conviés. Nous sommes bien placés pour savoir que la réalité est tout autre : nous sommes 200 ou 300 en France à tenter de vivre de la consultation et de l’enseignement astrologiques.

Pire encore : pour faire la preuve de leur mercantilisme, on fait porter aux astrologues la responsabilité du jeu « Astro » produit par la Française des Jeux ! (Alain Cirou dixit). Si cela continue, on nous fournira bientôt un uniforme rayé avec un chapeau pointu brodé dessus…

 

Quant à l’amalgame entre astrologie et horoscope, force est de reconnaître que le discours de nos consœurs le rend patent. On ne saurait cependant leur en tenir rigueur car la réalité sociologique de l’astrologie reste celle qu’elle était au temps de Cicéron : il y a toujours eu d’une part une astrologie populaire et de l’autre une astrologie savante. L’astrologie populaire produit aujourd’hui des horoscopes dans les médias comme elle produisait autrefois des almanachs, avec cependant une différence de taille : la diffusion de l’astrologie populaire génère des profits sans précédent grâce aux médias auxquels elle est soumise. Il est donc facile de comprendre que, face à ce rouleau compresseur, l’astrologie « savante » ne fait pas le poids. Elle est même en train de disparaître de notre paysage culturel car broyée, avalée, digérée et totalement assimilée par l’astrologie populaire. La preuve en est que, pour l’immense majorité de nos contemporains, « l’astrologie c’est l’horoscope ».

 

C’est bien là que réside notre difficulté, pour nous qui entendons faire valoir notre différence en tant que praticiens et défenseurs d’une astrologie non plus « savante », mais qualitative, intellectuelle, évolutive et humaniste, prenant toute sa place en qualité de doyenne dans la famille des sciences humaines et traditionnelles. Et c’est précisément sur ce point que se joue la mauvaise foi de nos contradicteurs et de ceux qui mettent en scène le sempiternel scénario où les astrologues se font invariablement démolir par les scientifiques : on place d’un côté des astrologues « populaires » qui cherchent à satisfaire leur public, jouent la carte du « charme » et répondent de manière évasive ou approximative aux questions qu’on leur pose, et de l’autre des scientifiques aux idées bien arrêtées sur le sujet, dont la seule intention est de discréditer leurs interlocuteurs. Du reste, Alain Cirou est arrivé sur le plateau avec des fiches toutes préparées qu’il s’est mis en devoir de citer dès le début de l’émission, décochant ses flèches empoisonnées aux astrologues qui n’en connaissaient malheureusement pas la parade.

 

Il nous faut donc nous travailler à ce que des astrologues praticiens soient invités à de tels débats et puissent répondre à leurs détracteurs avec des arguments solides. Un exemple : Alain Cirou a parlé à plusieurs reprises de l’astrologie qui serait basée sur le vague « présupposé » d’une correspondance entre le ciel et l’humanité. A cet argument il fallait répondre que ce présupposé s’appelle un postulat, que par ailleurs la science en compte un certain nombre, et que ce n’est pas parce qu’on ne peut pas prouver scientifiquement un fait que ce fait n’existe pas, surtout lorsqu’il est établi depuis plusieurs millénaires.

Le même grand prêtre de la raison prend ensuite Kepler en otage en affirmant que si ce dernier faisait des horoscopes, c’était uniquement pour de l’argent. Il aurait fallu à ce moment-là lui rappeler que Kepler a écrit « Vingt années de pratique ont convaincu mon esprit rebelle de la réalité de l’astrologie » et en citer la source : Kepler astronome astrologue, de Gérard Simon aux Editions Gallimard. Peut-être ces arguments lui auraient-ils cloué le bec, pour le plus grand amusement des téléspectateurs car en réalité beaucoup n’espèrent que cela : qu’un astrologue au discours crédible vienne contester le dogme scientiste au profit d’une approche plus humaine de la réalité.

Troisième anecdote enfin : quand on interroge une de nos consœurs au sujet d’un grand événement qui aurait coïncidé avec la découverte de Neptune, celle-ci parle de la révolution industrielle. La réponse n’est fondamentalement fausse, mais l’industrialisation est un phénomène qui s’est étalé sur plusieurs dizaines d’années, ce n’est donc pas un événement ! Résultat : la moue du scientifique en gros plan, où l’on pouvait lire un mélange de mépris et de consternation. Pour un astrologue, la découverte de Neptune (1846) doit entraîner pour réponse réflexe la Révolution de 1848 et le Manifeste du parti communiste de Marx (1847).

 

Mais je ne saurais conclure sans rendre un hommage aussi sincère qu’appuyé à notre consœur Anne Vernes, grâce à laquelle notre honneur a été sauvé et l’image de l’astrologie avec. Son intervention filmée était empreinte d’une belle hauteur de vue et d’une maîtrise du discours qui auront suffi, j’en suis convaincu, à éveiller une lumière dans l’esprit de certains.

 

Il nous appartient donc de dénoncer partout où on le pourra l’amalgame entre l’astrologie horoscopique, celle qui fait vendre et rapporte de l’argent, et l’astrologie des astrologues, l’astrologie réelle qui détient les clés de tant de mystères humains, l’astrologie traditionnelle qui finit aujourd’hui par se perdre à force de diffamations, de confusions et d’ignorance. Il nous appartient ensuite d’envoyer au front médiatique des émissaires qui connaissent parfaitement leurs dossiers et maîtrisent leur argumentaire, plutôt que de chercher à plaire.

A ce propos, pourquoi l’astrologie devrait-elle être nécessairement assimilée au charme féminin ? Cela provient peut-être de ce que son image s’est trouvée longtemps associée à une de nos consœurs dont les charmes ostentatoires s’exhibaient à la une des magazines. Mais si l’on va plus loin, cette image véhiculée dans l’inconscient collectif correspond en réalité à un processus de séduction mélangé à un pouvoir occulte fortement suggéré. Ainsi, tout laisse à penser que, dans l’esprit du public, c’est l’image de la sorcière qui est aujourd’hui accolée à l’astrologie ! Ceci explique peut-être pourquoi on ne voit jamais d’astrologues hommes sur les plateaux de télévision, le scientifique jouant alors le rôle de gardien de l’autorité morale qui ne voit aucun inconvénient à allumer le bûcher…

Mais, comme je le suggérais plus haut, ce schéma n’est pas immuable et il n’est pas interdit d’espérer qu’on assiste un jour à un remake de l’Arroseur arrosé. Faisons donc entendre la voix de l’astrologie scientifique (j’assume l’expression) et ne laissons plus à nos consœurs horoscopeuses l’exclusivité de la représentation astrologique dans les médias !

 

Didier Lustig

www.astrologue-conseil.fr

 

 

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